Je suis là, seule et persuadée d’avoir perdu ce que certains ont appelé mon don pour la photographie. Tout a changé … Tout est fade et vide de sens, et elles sont comme tout ça, reflétant acidement mon état d’esprit. Au final, je suis comme eux … Comme ceux qui m’ont poussé dans la photo avec le désir de leur montrer que la beauté est partout pour qui sait tendre la main. Montrer que la nature n’a pas besoin de nous pour exister, montrer que certains endroits ont été préservés. Je suis comme eux, pressée et angoissée. On tourne en rond, les habitudes nous poussent à ignorer les détails qui rendent ce monde vivable. On avance avec des œillères, sages et formatés, croyant que la seule relation que l’on a avec la nature, est un rapport de domination.

Mes récentes photos sont tout ça...  Sont empreintes de ce sentiment vide.

Je prends enfin du recul par rapport aux autres photos, à celles d’avant. Peut-être même que j’en prends trop, puisqu’elles ne paraissent plus m’appartenir. Ecouter le silence des personnes les observant est la meilleure des satisfactions … Je veux retrouver ce silence d’attardement.

Peut-être que je me suis éloignée de ce que j’aimais vraiment, de cette admiration béate devant un arbre solitaire. Mon gout pour la technique est devenu envahissant, limite handicapant. Plus rien ne passe... Je crois que je ne prends conscience que maintenant que les créations personnelles retranscrivent réellement notre état d’esprit... Tout est vide, plat. Enfaite, ce ne sont pas mes photos qui font vivre en moi ce sentiment de liberté, mais c’est bien cette liberté d’esprit qui permet de réaliser de belles photos.

J’ai besoin de retrouver tout ça, ce mélange entre gravité, prise de conscience et légèreté. Me perdre dans tout ça, et ne plus dire qu’elles ne sont pas de moi, mais bien d’elle.